Qu'est-ce qui m'avait pris ?
Mes jours de congé, je les passais enfermé chez moi. Enfermé, cloîtré. Rentré peu avant le jour, endormi jusqu'aussi tard que je le pouvais pour raccourcir la journée que j'aurais à passer. Dans l'attente que tout soit écoulé, que la nuit revienne, et le travail le lendemain. Mais cette fois… Non, pas cette fois.
La veille au soir, Ania m'avait proposé de rester au salon avec elle. A discuter, entre frère et soeur. Habituellement, elle allait travailler dans sa chambre. Ou lire, ou que sais-je encore. Avait-elle fini par comprendre mon manège ? Etait-elle inquiète par les cernes qui creusaient un peu plus mon visage ? Avait-elle aperçu mes côtes en passant à côté de la salle de bain ?
Je ne savais même pas si c'était pour m'empêcher d'aller faire n'importe quoi le soir ou simplement par envie de passer un moment avec moi. Envie d'être avec moi… Rien qu'à cette idée, même en y repensant, un sourire me venait aux lèvres. Même mes parents, parfois… J'avais l'impression qu'ils passaient un mauvais moment avec moi.
Toujours est-il qu'à cause de cela… Je m'étais réveillé tôt. Avant neuf heures. Il faisait déjà jour, et tant d'heures me séparaient du nouveau soir… Qu'allais-je pouvoir faire ? Lire, lire, et encore lire ? Ania n'était pas là, bien sûr, elle était très occupée, trop, sans doute… Je me lavai longuement, je m'allongeai sur le canapé, je me disputai avec Truc tentant de me convaincre de faire quelque chose. Jusqu'à ce qu'il m'indique le temps : il faisait gris. Lourd, sombre. Un orage était même prévu pour l'après-midi.
J'avalai un rapide repas, puisque la matinée tirait à sa fin, et m'habillai lourdement. Des vêtements bien couvrants, des chaussures montantes, des gants, une écharpe si jamais j'avais à cacher mon visage d'un éventuel soleil - je ne faisais pas confiance à la météo, pas alors que ça pouvait être une question de vie ou de mort - et un chapeau à larges bords.
Je me décidai alors à sortir. En pleine journée, oui. J'étais effroyablement tendu lorsque je franchis le seuil de l'immeuble et je pressai le pas en direction d'un bar que j'appréciais, dans mon quartier. Histoire de ne pas aller trop loin, au cas où. J'avais dépassé la moitié du chemin lorsque des trombes d'eau s'abattirent sur les rues.
Je vacillai au poids soudain sur mes épaules, posai une main sur le mur pour me soutenir. Le bord de mon chapeau m'était tombé sur les yeux, et je dus me résoudre à l'enlever pour y voir quelque chose, ce qui eut pour effet de coller mes cheveux à mes joues et mon cou. Je jurai, jetai un regard derrière moi. Mais le bar était plus près…
Me remettre en route fut plus que difficile. Je n'avais pas l'habitude d'avoir autant de poids à soulever. Et mes habits gorgés d'eau ne se contentaient pas de doubler - ou tripler ? - mon poids, ils gênaient aussi mes mouvements. J'atteignis enfin la porte du bar, la poussai, et trébuchai en ne levant pas assez le pied pour la petite marche.
Je m'étalai avec un couinement de surprise et de douleur, toutes les têtes se tournant vers moi. Le rouge me monta aux joues alors que je tâchais de me redresser. Je n'aurais pas pu faire mieux, comme entrée… Au moins, certains clients s'approchèrent de moi pour m'aider à me relever, et je les remerciai, le regard fixé par terre. Par les dunes, ce que je détestais me faire remarquer...
"Ca va, je vais bien… Merci, ça va aller."
Je me forçai à sourire, m'écartai et me laissai tomber sur la première chaise venue, dans l'espoir d'échapper un peu à tout ça et pouvoir me contenter de boire un verre et oublier ma déconvenue. Avant de remarquer que la table devant moi n'était pas vide, ramenant le rouge sur mes joues pâles.
"Ah, pardonnez-moi, je ne vous avais pas remarquée. Je peux m'installer à une autre table si vous préférez, je ne voudrais pas vous déranger," déclarai-je immédiatement, même si j'avais tout sauf envie de me relever.
Mes jours de congé, je les passais enfermé chez moi. Enfermé, cloîtré. Rentré peu avant le jour, endormi jusqu'aussi tard que je le pouvais pour raccourcir la journée que j'aurais à passer. Dans l'attente que tout soit écoulé, que la nuit revienne, et le travail le lendemain. Mais cette fois… Non, pas cette fois.
La veille au soir, Ania m'avait proposé de rester au salon avec elle. A discuter, entre frère et soeur. Habituellement, elle allait travailler dans sa chambre. Ou lire, ou que sais-je encore. Avait-elle fini par comprendre mon manège ? Etait-elle inquiète par les cernes qui creusaient un peu plus mon visage ? Avait-elle aperçu mes côtes en passant à côté de la salle de bain ?
Je ne savais même pas si c'était pour m'empêcher d'aller faire n'importe quoi le soir ou simplement par envie de passer un moment avec moi. Envie d'être avec moi… Rien qu'à cette idée, même en y repensant, un sourire me venait aux lèvres. Même mes parents, parfois… J'avais l'impression qu'ils passaient un mauvais moment avec moi.
Toujours est-il qu'à cause de cela… Je m'étais réveillé tôt. Avant neuf heures. Il faisait déjà jour, et tant d'heures me séparaient du nouveau soir… Qu'allais-je pouvoir faire ? Lire, lire, et encore lire ? Ania n'était pas là, bien sûr, elle était très occupée, trop, sans doute… Je me lavai longuement, je m'allongeai sur le canapé, je me disputai avec Truc tentant de me convaincre de faire quelque chose. Jusqu'à ce qu'il m'indique le temps : il faisait gris. Lourd, sombre. Un orage était même prévu pour l'après-midi.
J'avalai un rapide repas, puisque la matinée tirait à sa fin, et m'habillai lourdement. Des vêtements bien couvrants, des chaussures montantes, des gants, une écharpe si jamais j'avais à cacher mon visage d'un éventuel soleil - je ne faisais pas confiance à la météo, pas alors que ça pouvait être une question de vie ou de mort - et un chapeau à larges bords.
Je me décidai alors à sortir. En pleine journée, oui. J'étais effroyablement tendu lorsque je franchis le seuil de l'immeuble et je pressai le pas en direction d'un bar que j'appréciais, dans mon quartier. Histoire de ne pas aller trop loin, au cas où. J'avais dépassé la moitié du chemin lorsque des trombes d'eau s'abattirent sur les rues.
Je vacillai au poids soudain sur mes épaules, posai une main sur le mur pour me soutenir. Le bord de mon chapeau m'était tombé sur les yeux, et je dus me résoudre à l'enlever pour y voir quelque chose, ce qui eut pour effet de coller mes cheveux à mes joues et mon cou. Je jurai, jetai un regard derrière moi. Mais le bar était plus près…
Me remettre en route fut plus que difficile. Je n'avais pas l'habitude d'avoir autant de poids à soulever. Et mes habits gorgés d'eau ne se contentaient pas de doubler - ou tripler ? - mon poids, ils gênaient aussi mes mouvements. J'atteignis enfin la porte du bar, la poussai, et trébuchai en ne levant pas assez le pied pour la petite marche.
Je m'étalai avec un couinement de surprise et de douleur, toutes les têtes se tournant vers moi. Le rouge me monta aux joues alors que je tâchais de me redresser. Je n'aurais pas pu faire mieux, comme entrée… Au moins, certains clients s'approchèrent de moi pour m'aider à me relever, et je les remerciai, le regard fixé par terre. Par les dunes, ce que je détestais me faire remarquer...
"Ca va, je vais bien… Merci, ça va aller."
Je me forçai à sourire, m'écartai et me laissai tomber sur la première chaise venue, dans l'espoir d'échapper un peu à tout ça et pouvoir me contenter de boire un verre et oublier ma déconvenue. Avant de remarquer que la table devant moi n'était pas vide, ramenant le rouge sur mes joues pâles.
"Ah, pardonnez-moi, je ne vous avais pas remarquée. Je peux m'installer à une autre table si vous préférez, je ne voudrais pas vous déranger," déclarai-je immédiatement, même si j'avais tout sauf envie de me relever.