Lucian Kaernis || En avant pour l'aventure !

Cher Cahier ( ? )  
Je ne suis pas une fille, je ne sais pas comment m’adresser à toi. Alors bon… J’ai sans doute l’air ridicule, alors heureusement que personne ne me voit faire ça !

Je me suis déjà brièvement présenté à toi ci-dessus mais je vais continuer et de donner plus de détails sur ma personne. Commençons déjà par ce à quoi je ressemble.

Je pense être de taille moyenne. Je ne me compare pas vraiment aux autres personnes, donc en fait, je ne pourrais pas vraiment le dire. Mais je sais, et j’en suis sûr, que ma masse corporelle n’est pas celle qui faudrait. Pourtant je ne me prive pas de manger, ni rien ! Mais cela peut me jouer des tours…

Mais ce n’est pas le sujet principal de notre conversation. Quoique cela n’en est pas une car il faut être deux et que là, je ne fais que me présenter…
Revenons-en donc à nos moutons de prairie.

J’ai la peau mate, mais pas trop foncée. Sinon, j’aurais dit être chocolat. Oui, bon, on va dire que j’en suis un mais au lait. Mes cheveux, quant à eux, tranchent royalement avec ma couleur de peau. Ils sont plutôt clairs. Un blond platine. Car oui, je refuse que l’on dise que je suis déjà blanc à mon âge. C’est juste un blond très clair. Je ne suis pas fort en génétique donc je ne saurais pas expliquer cela. C’est peut-être dû à un ancêtre lointain ? Il y a des chances. Mais me rendre blanc à vingt ans. Un drame ! Heureusement que cela m’offre du charme. Enfin, je suppose.  Ma chevelure n’est pas longue. C’est ce qu’une femme dirait. Mais elle n’est pas non plus courte. Je ne saurais pas faire de queue, les mèches plus à l’avant n’entreraient pas dedans. Et souvent, ils n’ont pas d’ordre. Mais ce n’est pas un drame. De toute façon, ils sont retenus par un bandeau de couleur.

J’ai des yeux de couleur dorée. Mes cils sont longs. C’est parfois ennuyant. Oui, tu sais, quand ce cil veut se détacher mais te pique dans l’œil ! Et bien, cela fait mal ! Mais on n’a pas le choix et on fait avec.

Je suis fin et maigre. Les vêtements que je porte sont donc toujours trop larges pour moi. Mais très souvent colorés. La couleur, c’est la vie. Regarde la nature, c’est pareil ! Enfin… J’aimerais bien voir une plaine d’herbe verte et moins de sable. Ce serait encore plus vivant.

Cher Cahier,

Je vais maintenant te parler de moi. Connais-tu une chose plus compliquée que cela ? Moi, pas vraiment. Enfin, si surement mais comme je n’y pense pas, je le vois pas tout de suite.

Tu sais, j’essaie d’être souriant, sympathique et aimable. Mais ce n’est pas facile tous les jours… Quand je vois une de ces têtes d’imbéciles, qui font les idiots, qui se prennent pour les rois du monde, j’ai juste envie de leur mettre mon poing dans la face. Je sais, cela ne se fait pas. C’est pour cela que je me retiens de le faire. Mais je ne suis quand même pas très patient…Quelqu’un me demanderait de compter le sable du désert que je l’enverrais balader tout aussi vite !

Ah ! Je suis très tactile ! C’est apparemment dérangeant pour beaucoup de monde. Je ne comprends pas pourquoi…  Oui, la chaleur, mais et alors ? Je ne touche pas forcément peau contre peau.  Parce que je ne suis pas un pervers fini, moi ! Ne me dis pas que tu ne me crois pas. De toute façon tu es un  bout de papier… Tu ne pourrais même pas me répondre…

Cela me fait penser que malgré mon âge, j’agis encore parfois comme un gosse. C’est tantôt un défaut, tantôt une qualité. Mais quand la situation le demande, je suis sérieux. Mais trop de sérieux tue le sérieux, nous sommes d’accord ?

Et puis, tu sais, avec mon corps qui est un peu trop frêle, disons ce qui est, je ne peux pas tout me permettre. Alors bon… après une enfance un peu trop surprotégée, je profite autant que je le peux et comme je le peux ! Après tout, la vie est une question de volonté !

En revanche, je n’aime pas la société actuelle. Tu dois me trouver bizarre… Mais c’est parce que je n’aime cette société qui est la nôtre que j’écris sur toi ! Je n’ai jamais vraiment apprécié ceux ayant une autorité ou une influence forte. Je ne suis vraiment pas fan de l’Armée et de tout ce qui tourne autour. De même pour la technologie. On ne vit que grâce à ça maintenant ! C’est un peu de l’abus, non ? Cela donne une excuse à certains de rester confinés chez eux… C’est déplorable et pathétique…  De même que les Pilleurs ! Ils croient que c’est en faisant le mal qu’ils vont tout rétablir ? Oui, bon, okay, ils n’ont pas tous ce noble but. Certains l’ont-ils seulement ? Ce monde ne tourne plus rond. Mais alors là, plus du tout. Est-il encore seulement normal ? Je ne le crois pas. À moins que mon sens du mot normal vienne du siècle passé, si ce n'est pas avant encore !

J’aurais bien envie de partir, de tout plaquer là et de m’en aller. Un sac sur le dos et découvrir un endroit meilleur. Mais la mort m’attendrait très certainement au tournant. J’ai l’impression de ne pas être très courageux en parlant comme ça. Mais c’est peut-être vrai. Tu vois, j’arrive même à douter de moi. Mais je te l’avais dit, non ? Que c’était compliqué de se définir. Au moins, je sais que je ne suis pas fou. Je suis juste un jeune homme comme tous les autres mais refusant de se soumettre à sa société. Une sorte de rebelle ? À moitié. Un anarchiste ? Je n’en aurais pas l’audace.

Je pense que je vais m’arrêter là, Cahier. Il se fait tard… Aussi il faudrait que je te trouve un nom, parce que là, ça fait franchement bizarre !

Chère Célestine,
J’ai décidé de t’appeler comme cela maintenant, j’espère que cela ne te dérange pas. Et pourquoi Célestine ? Parce que je trouve ça mignon et adorable. Et aussi parce que j’ai toujours voulu avoir une petite sœur à qui me confier, avec qui partager mes joies et mes peines.

Tu sais, je suis enfant unique. J’ai toujours été un gamin faible, supportant mal la chaleur. À cause de cela, j’avais une mère trop protectrice. C’est sans doute pour cela que je voulais une petite sœur, pour qu’elle s’occupe d’elle et me laisse grandir en paix. Du coup, je dois bien t’avouer que ça n’a pas été facile tous les jours. En étant enfant, il n’y avait aucun problème. Ce fut plus tard, au moment de l’adolescence.

Comme tous les autres, je voulais sortir, m’amuser, faire les bêtises que tous les gamins font ! Mais ma mère était toujours sur mon dos, à me surprotéger, à m’invectiver de rester à la maison. De maman poule, elle passa à mère stricte. Je n’aimais plus rester à la maison, je ne désirais plus l’entendre me donner des ordres ou me chouchouter. Je voulais juste devenir indépendant peu à peu. Mais avec elle sur le dos, c’était impossible…

Heureusement, il y avait mon père. Plus laxiste, moins souvent là, il me laissait plus de libertés quand il était enfin présent. Quand il était à la maison, c’était comme si il y avait un air plus léger qui circulait. Apparemment, face à lui, maman était moins chiante. Mais je ne savais pas pourquoi et je l’ignore toujours.

Puis, vers mes 15 ans, j’eu la brillante et magnifique idée de sortir. Oui, sortir. Complétement et entièrement. Vers le dehors ! Vers l’étendue de sable ! Pourquoi ? Par curiosité. Pour savoir s’il n’y avait que du sable. Pour vérifier s’il n’y avait pas des civilisations meilleures que la nôtre.

Déjà à l’époque, je n’aimais pas notre « monde ». Je n’ai pas de raison à cela. Peut-être à cause du travail de mon père ? Peut-être parce que après ma naissance ma mère fut incapable de  donner naissance à un autre enfant ? Peut-être que cela était déjà en moi depuis le début ?

Quoi qu’il en soit, je voulais découvrir l’extérieur de 1400 en m’enfuyant furtivement. Mais jamais je n’ai eu aussi pire idée… Je n’avais bêtement pris qu’une seule gourde avec moi. Et comme un crétin, je pensais que seul mon sens de l’orientation à toutes épreuves suffirait… Mon organisme supporta mal la chaleur, le soleil, le vent et après la déshydratation. Je me sentis juste tomber puis ce fut le flou total.

À mon réveil, je vis évidemment d’abord le visage de ma mère. Inquiète mais en colère, elle était heureuse que je sois revenu à moi. J’étais déboussolé, je ne savais pas où j’étais. De la fournaise du désert, je passais à une chambre blanche et fraîche. Ma mère avait un flot de paroles immense à déverser. Tellement que je n’en entendis pas la moitié. L’infirmière, voyant mon besoin de repos, la fit sortir et je me rendormis.

Rapidement je pus regagner la maison familiale. Et la maman stricte devint un pot de colle. Elle l’était tellement qu’un jour, le volcan éclata. Une dispute violente eut lieu. Je voulais vivre ma vie. Cette vie était mienne, pas sienne. Je refusais de remercier ceux ou celui qui m’avait sauvé. Mon amour propre ou quelque chose comme ça en avait pris un coup. Je refusais aussi cette surprotection qui était étouffante. Je refusais encore toute forme d’autorité. Je voulais juste partir mais on m’avait montré à quel point je ne le pouvais pas. Pas seul en tout cas.

Suite à cela, j’évitais tout contact avec ma mère. On mangeait en silence. Un silence pesant qui parfois diminuait avec la présence de mon père. Un homme étrange quand même… Dont je ne sais quasiment rien.

Le temps passa. Lentement mais surement. Ma mère et moi, on a fini par se réconcilier, à peu près. Je pense qu’elle avait compris que mon ignorance vis-à-vis d’elle était sans doute pire que de me perdre. Puis je fis des études poussées en archéologie. Non seulement je trouvais cela passionnant, mais aussi cela était un moyen pour moi de sortir, de découvrir ce monde que je voulais voir étant gosse et cela avec plus de sécurité ! Études finies, diplôme en poche, je pouvais enfin réaliser ce rêve d’enfant. Ou en tout cas, je le pensais…