Leïla Mu'Tahani - L'oiseau rare

Je me réveille dans le sanctuaire, étalée sur le sable blanc.

J’ai des maux de tête pas possible et j’ai l’impression que mes vêtements sont aussi lourds que du plomb. Je jette un coup d’œil sur eux, je suis vêtue de tout ce qu’il y a de plus léger, c’est-à-dire un pantacourt bouffant resserré en dessous des genoux, une petite ceinture en or (offerte par mon père avant le Grand Sommeil) et en haut je porte un brassière d’une belle couleur bordeaux.

Je passe ma main dans mes cheveux bruns attachés en queue de cheval. Avec ce mal de tête j’ai du mal à me souvenir de tout ce qui s’est passé avant le Grand Sommeil mais je revois ma mère dont j’ai hérité mon nez assez fin et mes yeux marrons aux reflets rouges. Je revois aussi mon père qui lui m’a donné sa belle peau mate et ma silhouette d’une finesse incroyable que je conserve malgré mon appétit considérable.

Bon ce n’est pas que je n’aime pas le sanctuaire mais y va bien falloir que je sorte un jour, je me lève et à peine ais-je fais mon premier pas que je vois mère toujours endormie sur le côté.

Je décide de faire un petit détour vers ma mère, la voir endormie me donne un peu envie de pleurer, après tout maintenant qui va chantonner en faisant le repas, qui va me dire de ne pas me perdre pendant mes balades matinales (je n’ai aucun sens de l’orientation) et qui va me féliciter de mon fabuleux odorat ?! Hé oui, mon odorat est assez développé par rapport à la moyenne et je crois bien que c’est ma principale qualité. Ma mère me disait aussi qu’en plus j’ai beaucoup d’énergie à revendre.

Je cherche du regard mon père. Où est-il ?

Une petite lumière s’allume dans mon cerveau et je me dis que s’il n’est pas dans le sanctuaire, il est dehors en train d’attendre que je me réveille avec maman. Je me remets en route mais en approchant du couloir de la sortie je vois mon père toujours dans un sommeil profond.

Ma joie s’évanouit tout de suite, il n’y a personne dans ma famille qui est réveillé, que vais-je faire ? Rester dans le sanctuaire en attendant que tout le monde se réveille ? Non, je mourrai de faim et de soif au bout de quelque jours. Mais qui aller voir une fois sortie du sanctuaire ? Certes j’irais au campement mais… Bon calmons-nous, je vais trouver une solution. Déjà il faut que je sorte…

Je suis dans le couloir qui mène jusqu’à la sortie. Je débouche enfin et je vois le beau ciel bleu dont je rêve depuis quelques minutes. Je vois aussi le soleil, du sable et … heu… une petite ombre au loin. Surement quelqu’un qui vient du campement ! On dirait que j’ai de la chance aujourd’hui !

Je me mets immédiatement à courir vers l’individu en lui criant de m’attendre. J’ai beau hurler à plein poumon, la silhouette continue son chemin nonchalamment. Je persévère cependant et je force sur mes jambes encore à moitié assoupies. L’effort est d’autant plus rude que le soleil ébloui mes yeux encore peu habitués à la lumière ce qui les brouillent de larmes. Je fais l’erreur de les fermer un instant ce qui devient fatale lorsque mon pied ne rencontre que le vide. Par réflexe je me mets en boule et je dégringole au bas de la dune.

Une fois arrivée, j’ai la tête qui tourne affreusement mais je positive en me disant que je suis descendue beaucoup plus rapidement que si j’avais couru. Grâce au cri de guerre (lire : hurlement de peur) que j’ai poussé en tombant, l’individu m’a vu. Il marche vers moi et me tend le main pour m’aider à me relever, un doux sourire aux lèvres. C’est là que je me rends compte de la catastrophe.

Celui qui aurait dû être mon héros est une personne âgée qui me regarde intriguée. Je ne dois pas faire bonne impression car je la regarde fixement, surprise, sans bouger d’un pouce.

Bon, à part cette grand-mère je ne vois pas qui je pourrais rencontrer dans les alentours donc je lui explique ma situation et elle me sourit gentiment en me demandant comment je m’appelle. Après de vagues présentations elle me propose de rester chez elle le temps que mes parents se réveillent. Je la suis donc jusqu’au campement.

Une fois chez la grand-mère je rencontre une jeune fille dont les yeux gris sont aussi intense qu’un nuage orageux et dont les cheveux lisses et bruns sont tressés en deux nattes. La jeune fille se nomme Nour tandis que la grand-mère, elle, est le Sage Ra’Ifah; Nahla de son second prénom. Le lendemain Nour et moi sommes allées cueillir des fleurs pour que Nour puisse faire des parfums et je mets à profit, à cette occasion, mon odorat très développé.

J’ai continué d’aider Nour à cueillir des fleurs jusqu’à ce qu’un beau jour de ma onzième année Grand-mère me proposa de devenir son apprentie fauconnière. Après quelques minutes de réflexion j’ai accepté et c’est ainsi que j’ai commencé à apprendre les secrets de ces êtres ailés.

Le temps passa vite et le moment de passer à l’âge adulte arriva avec mes douze ans. On me donna ainsi mon second prénom: Rawla.